T11 - Sept étonnant ...
Le véritable problème fut posé quand le père Mathieu revint de la foire, poussant devant lui les vingt-huit moutons acquis le matin même.
Jusqu'alors, les opérations s'étaient déroulées sans aucune difficulté.
Mais il fallait maintenant répartir ces vingt-huit bêtes dans les sept bergeries que comportait la ferme, et çà, croyez-en le père Mathieu, ce n'était pas une mince affaire.

La division

Il appelle Toine, son fils aîné:

- Toine, lui dit-il, tu vas me prendre ces vingt-huit bêtes et me les installer dans nos sept bergeries. T'en mettras le même nombre dans chacune.
- Et ça en fait combien donc dans chaque? questionna le Toine.
- Décidément, Toine, t'es pas bien futé. Apprends que, pour faire un partage, on pose une division. Tiens prends une feuille de papier, je vas te montrer.
- Et le père Mathieu expliqua à Toine les subtilités de l'opération

28 : 7 = 13 reste 0

2
8
7
2
1
1
3
0

- Vingt-huit divisé par sept:En 8 combien de fois 7? il y va une fois. Une fois 7 fait 7 ôté de 8 il reste 1. J'abaisse le 2. En 21 combien de fois 7? Il y va 3 fois. 3 fois 7 font 21, il reste 0. Tu mettras donc 13 moutons dans chaque bergerie.

- Bien, père, fit le Toine, convaincu par tant de science. Il partit incontinent, pour procéder à la répartition. Une heure plus tard, Mathieu le vit revenir tout piteux:
- J'y arrive pas, père. Doit y avoir une erreur.

La multiplication

 

- Ecoute-moi bien dit son père. Y a pas d'erreur possible. D'ailleurs pour te le prouver, on va opérer autrement. Je t'ai dit 13 moutons dans chaque bergerie. Si on multiplie 13 par 7, on doit retrouver les 28 bêtes, allons-y:

13 X 7 = 28

1
3
x
7
2
1
7
2
8

Treize multiplié par sept: 7 fois 3 font 21; et 7 fois 1 fait 7. Tu vois que 21 et 7, ça fait bien 28.

D'ailleurs, pour être plus sûr, on va faire la preuve par 9:

3 et 1 font 4.Je pose 4 en haut et j'écris 7 en dessous. 7 fois 4 font 28. 8 et 2 font 10.J'écris 1 à gauche. Maintenant le résultat : 8 et 2 font 10. J'écris 1 à droite. Tu vois bien que...

Allez va t'en me mettre treize bêtes dans chaque bergerie.

(Ici, normalement, Mathieu aurait dû s'inquiéter, puisque 7 fois 13, comme 7 fois 4 font également 28. Mais s'il fallait encore s'attacher à tant de menus détails, on n'avancerait jamais. On continue donc.)

C'est un Toine effondré qui revint une heure plus tard.

- J'y arrive toujours pas. Y a sûrement quelque chose qui va pas dans les comptes.

L'addition

- Y a surtout qu't'es pas bien malin, fils, dit le père Mathieu. La division, la multiplication, c'est trop fort pour toi. L'addition, ça doit aller mieux:

1
3
+
1
3
+
1
3
+
1
3
+
1
3
+
1
3
+
1
3
2
8

 

J'écris 13 sept fois de suite, et j'additionne 3 et 3, 6 ; et 3, 9 ; et 3, 12 ; et 3, 15 ; et 3, 18 ; et 3, 21; et 1, 22 ; et 1, 23 ; et 1, 24, 25, 26, 27, 28. Es-tu convaincu, cette fois ? Allez, va. Et le Toine repartit encore une fois, loger les maudites bêtes. En fin de soirée, il revint triomphant.

- Ça y est, père, tous les moutons sont rentrés.
- Comment que t'as fait?
- Je les ai fait rentrer un par un en faisant le tour des bergeries. Et pour être tout à fait sûr, quand ils ont tous été placés, moi aussi, j'ai fait mes comptes.
- Comment cela?
- J'ai compté les pattes, dit le Toine.
- Et ça va?
- Oui, dans chaque bergerie, j'ai trouvé 16 pattes.
- Attends voir, dit le père Mathieu. Faut pas s'emballer. T'as bien dit 16 pattes dans chaque bergerie. Etant donné qu'un mouton a 4 pattes si je divise16 par 4, je saurai combien tu as mis de bêtes dans chacune.

16 : 4 = 13 reste 0

1
6
4
1
2
1
3
0

Et la nouvelle division fut posée : seize divisé par quatre ; en 6 combien de fois 4 ? Il y va une fois. Une fois 4 fait 4 ; ôté de 6, il reste 2. J'abaisse mon 1. En 12 combien de fois 4? Il y va 3 fois. 3 fois 4 font 12 ; ôté de 12, il reste 0.

( Tu vois bien, triompha le père Mathieu; qu'est-ce que je t'avais dit ? Il y en a bien 13 dans chaque bergerie.

Depuis ce jour; le Toine déborde d'admiration pour la haute compétence mathématique de son père. Quant au père Mathieu, il pense sérieusement à se rendre au bureau de l'Etat-Civil, pour y demander qu'on supprime la lettre I de son nom.

Matheu